lundi 17 novembre 2014

[vu sur les forums] Vers un modèle de Community Land Trust ?


Retour sur un échange du Forum Francophone des Biens communs, où l'on y parle d'espaces publics, de modèles communautaires en Belgique. Les questionnements sont intéressants ...


"Pour votre information, une série de citoyens et d'associations essaient en Belgique d'ouvrir des espaces publics non gouvernementaux au sein de l'appareil d'état ou à côté de ce dernier. Nous posons que l'échelle de délégation à laquelle nous sommes parvenus est largement trop élevée et incomplète (du Quartier à l'Europe en passant par la Région Bruxelloise et l'état Belge dans notre cas). Nous travaillons sur des objets d'institution qui instituent leurs propres règles, en intégrant les pouvoirs publics dans la mesure où une coopération est possible.
Cela pourra se faire dans le cadre : - du Community Land Trust que nous mettons en oeuvre depuis 2008 (initiative visant à acquérir et gérer du foncier en bien commun en socialisant les plus-values foncières), - dans le cadre des bassins versants solidaires - ou encore dans le cadre de "Commons Josaphat". 
Enfin, je tenais à vous toucher qq mots sur cette dernière initiative, Commons Josaphat. S'agissant d'un processus en construction, nous avons besoin de toute la matière grise disponible. Ceux qui n'ont pas assez de temps pour continuer la lecture du mail peuvent s'arrêter ici, l'essentiel de la proposition de collaboration se trouve ci-dessus. Pour les autres, quelques informations supplémentaires ci-dessous. 
Nous réfléchissons sur 24 ha de friche en propriété publique qui devraient être privatisée à 77% à l'horizon 2027. La valeur réelle de ce fond s'élève à 54 Millions d'€. C'est donc au minimum un objet qui nécessite institution. Il est aujourd'hui public; il sera privé demain. Comment créer les conditions pour qu'il devienne commun? C'est la question que nous posons. Comment assurer la préservation de ces 54 M€ de valeur foncière au bénéfice de la collectivité? On voit assez que la position politique représentative - l'appareil technique et partisan- est défaillante. Elle pose la privatisation comme horizon de dvlp. On voit par ailleurs que la rénovation intégralement publique aurait un coût disproportionné (oscillant autour du millard). Quid alors?  
Nous investigons le modèle de Letchworth. 
Par ailleurs, nous avons lancé, à Bxl, les Community Land Trust qui construisent des micro réponses à ces questions. En travaillant à partir de la friche Josaphat et de tout ce dont elle doit devenir le support pour faire ville, nous nous obligeons à penser le social dans sa globalité. Que serait une génération d'emploi en bien commun? Que serait une éducation en bien commun? Que serait une place publique en bien commun? Sa propriété doit elle-être publique? Ou partagée entre toutes les personnes qui l'utilisent?  
Et globalement, quelle est la bonne échelle de décision pour cette friche? Les riverains qui en ignorent à peu près tous l'existence? Les pouvoirs publics régionaux qui comptent la privatiser? Les futurs habitants que l'on ne connait pas encore? Ceux qui finissent leurs études de droit et achèteront les terrains privés en 2024 ? ou les 44 000 personnes sur les listes d'attentes des logements sociaux qui se presseront au portillon des 23% de logements publics à cette même période ?  
L'hypothèse de Commons Josaphat et des biens communs consiste à dire que l'espace de gouvernance et ses mécanismes ne recouvrent pas un périmètre existant (le quartier futur, voir le quartier et son pourtour), pas plus qu'un périmètre administratif (la commune, la région,...). 
L'espace de gouvernance doit être composé d'une présence :  
des riverains (ceux qui sont concernés par le futur),
des futurs habitants du quartier (donc à ce stade, la liste d'attente des logements publics),
des travailleurs de ce quartier (autrement dit, même des flamands et des wallons qui viendraient dans le quartier, en tant que la ville dans laquelle ils passeront 40h semaine est celle qui accueille leur lieu de travail, pas celle où ils dorment),
des représentants des échelles administratives suppérieures (commune et région, oir communauté dans le cas belge),
des représentants des infrastuctures qui traversent le quartier (SNCB+STIB)
- ...  
Et ce nouvel espace de gouvernance serait en charge de décider du devenir de ce quartier dans les multiples composantes qui en font un morceau de la ville. Ils auraient à minima :
- à prendre soin de ces 54 millions de valeur foncière, d'assurer que cette valeur se préserve que les richesses qu'elle dégage servent à la collectivité.
- à assurer que ce morceau de ville reste accessible au 51% de la population les moins riches (soit à la majorité faible, la forte étant libre de se trouver une place ailleurs). 
Bref, il y a là-dedans de l'utopie, de la contestation et de la proposition. Les pouvoirs régionaux l'ont saisi en essayant d'abord de torpiller notre organisation (coupe de subside, pas d'accès autorisé à la friche, menace juridique si occupation...) Et on continue le petit bonhomme de chemin. Nous étions 15 au départ, nous sommes aujourd'hui une 50aine de personnes à réfléchir à ce que serait un quartier en bien commun. Des facs d'architecture et de droit commencent à nous emboiter le pas.  
Ce qu'il y a d'intéressant là-dedans, à travailler l'utopie à partir d'un lieu, à travailler une utopie située, c'est que toute position théorique ne peut se satisfaire de la chaleur englobante du concept ou du confort de la critique externe (les associations de contestation marxiste de la ville estiment que nous sommes démesurément réformistes, que la meilleure solution, c'est la propriété publique et le logement social, point).  
Pour nous, chaque position doit se traduire dans un "Mais comment fait-on demain?". Même si c'est moins rentable financièrement que d'investir les partis politiques, même si c'est plus hasardeux et inconnu, même s'il n'y a pas nécessairement de jalon concret qui donne la certitude d'une progression, nous poursuivons ce cheminement, convaincus de son intérêt. 

Nous sommes en recherche d'idées pour élaborer des propositions crédibles de développement alternatif de ce morceau de ville. Nous avons lancé un appel à idée qui a abouti en novembre dernier à la remise d'une 60aines de propositions. Afin que le process soit le plus inclusif possible, la commande de l'appel à idée est restée très ouverte: remettez des idées pour la friche, exprimez en quelle mesure elle répond à des nécessités collectives et racontez comment elle peut instituer des communs  et être gérée comme telle? 
A présent, nous retissons des liens entre ces 60 idées et tâchons de faire un saut qualitatif pour que nous propositions puissent rentrer en dialogue avec la proposition de privatisation portée par le pouvoir public.
Longue explication du process pour solliciter vos idées et imaginaires sur le sujet. Si vous connaissez des expériences significatives qui pourraient nous inspirer, je vous remercierais encore de me les renseigner. "
Loïc G.

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